La vallée de la Bruche, phare mondial de la pédagogie

Publié le par le hussard noir

En faisant le ménage de printemps de la messagerie électronique de l'école, je suis tombé sur une perle, tellement discrète que j'étais passé à côté sans la voir. Dans un petit encart du journal de la circonscription, la moyenne de la circo aux évaluations de mi-CP.

 

 Pour goûter pleinement le sel de l'info, il faut savoir que ces évaluations sont assez anciennes, centrées exclusivement sur l'intérêt des enfants et ne posent aucun problème éthique ou politique. Elles commencent en octobre par un diagnostic des difficultés rencontrées puis en février ont lieu de nouvelles évaluations destinées à proposer une aide ciblée aux enfants qui en ont besoin, à grand renfort de PPRE (Plan Particulier de Réussite Educative: une paperasse miraculeuse selon ses instigateurs mais c'est une autre histoire..)

 

Or quelle ne fut pas ma surprise de voir des résultats frisant les 90% de réussite dans tous les domaines évalués. 90%! Vous ne vous rendez pas compte, c'est tout simplement la fin de l'illettrisme, c'est l'humiliation du systéme scolaire finlandais que tout le monde donnait bêtement en exemple jusqu'à aujourd'hui. Et moi qui ne le savais pas! On ne m'avait rien dit.

 

J'ai quand même eu un léger doute et pour en avoir le coeur net j'ai été revoir les résultats de ma classe. Cette année, je n'y suis pour rien, j'ai un super millésime: le genre de bambins en brioche qui donnent l'illusion à l'instit qu'il est excellent pédagogue. Aurais-je pu envoyer à mon inspecteur du 95% de réussite sans m'en rendre compte? Et là, horreur! Des chiffres sans appel: 68%, 71%, 71%, 67%... Quelle honte! Mes super gamins ont plombé la moyenne de la circonscription. Comment est-ce possible?

 

C'est à n'y rien comprendre. Cette année les évaluations étaient plus difficiles et au lieu de baisser, les chiffres de la circo ont bondi de 10% d'un coup. Je suis devenu mauvais malgré mes 25 ans de métier ? ou alors mes collègues ont trouvé la pierre philosophale de la pédagogie? Ils n'auraient quand même pas osé aider leurs élèves, embellir le tableau, corriger augustement... Qu'auraient-ils eu à y gagner?

 

Ce qui est certain c'est que je me suis surpris en flagrant délit de comparaison. Dur à admettre mais oui, la lèpre de la performance et de la concurrence n'épargne pas les incorriptibles hussards de la République.

 

Nous sommes déjà notés sur les résultats des élèves et non plus sur notre pédagogie. Alors que se passera-t-il quand l'année prochaine le projet d'école devra annoncer ses objectifs en terme de réussite des élèves? Que se passera-t-il quand le palmarès des écoles sera publié et que les parents pourront choisir la "meilleure" pour leur enfant?

 

J'aurai à choisir entre tricher comme tout le monde (tant que je peux être juge et partie, car bientôt l'évaluation sera très logiquement confiée à des officines privées impartiales) ou continuer faire mon boulot consciencieusement en comptant sur le bouche à oreille pour que le RPI ne se vide pas.

 

 

 

 

 

 

 

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