courrier des lecteurs à Marianne (époque Allègre)

 

MOI, UN HEROS ?

 

Votre article sur les profs (ces héros) me laisse un goût amer. Pourtant je suis instituteur depuis 12 ans en ZEP, et, comme ces héros, j’essaie d’innover, de me perfectionner chaque année et comme eux, mon travail me rend heureux. Alors qu’est -ce-qui m’empêche de tranquillement m’identifier à un héros ? C’est que je trouve injuste et malhonnête d’opposer comme vous le faîtes les héros non-grévistes aux "jusqu’au-boutistes" supposés irresponsables et conformistes. Cela, uniquement pour prôner la concurrence au sein de l’Education Nationale.

Vous savez, on enseigne comme on vit, avec tout ce qu’on est : ses forces et ses faiblesses, ses rêves et ses blessures. On ne se planque pas en ZEP. D’ailleurs, les profs qui, gratuitement, font travailler leurs élèves hors de l’établissement sont-ils irresponsables ?

Gratuitement… C’est là le maître-mot. La gratuité est tout à la fois la grandeur et le talon d’Achille des enseignants, parce qu’au fond, qu’est-ce-qui nous pousse à bien faire notre travail ? Ni l’argent, ni les lauriers, ni la concurrence, ni la peur de l’inspecteur : rien de ce qui fait courir le monde. L’enseignement est un oasis de valeurs dans le désert du marché. Voilà bien ce qui fait grincer des dents et fait de nous des "mammouths "intempestifs à éliminer. Faisons-nous donc honte ? Sommes-nous donc un exemple si subversif ? Je l’espère !

Autres questions : Devient-on un citoyen responsable, un humain digne de ce nom par appât du gain ou des honneurs ? Pour établir sa supériorité sur autrui ? Par peur du gendarme ? Non, bien entendu ! Or, précisément, c’est cela que je demande : qu’on laisse le modeste artisan de l’humanité que je suis enseigner par l’exemple, librement et en paix. Gratuitement.





Marianne,

La sympathie que tu manifestes pour Claude ALLEGRE dans chaque article ayant trait à l’Education Nationale, commence à m’agacer. Enfin comment ?

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  • Tu dénonces le discours médiatico-libéral. Bien. Alors que penses-tu du projet, clairement exposé dans la Charte pour bâtir l’école du XXI siècle, de faire des instits les chefs d’un orchestre de C.D.D précarisés et sous-payés ?
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  • Tu pourfends les idées reçues. Parfait, en voilà une :  " L’école doit être réformée. " Pas plus Claude ALLEGRE que les Français n’ont de véritable critique à formuler : l’un calomnie les enseignants, les autres, à 80%, leur font confiance. Par ailleurs, les ministres se succèdent mais leurs réformes s’additionnent ; tout est devenu prioritaire. Les réformes ? On en crève !
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  • Tu défends la République. Sais-tu que son école est en danger ?La Charte se propose, outre de précariser et flexibiliser (mondialisation oblige ?) de développer les Contrats Educatifs Locaux. De quoi s’agit-il ? De donner la liberté aux communes riches de favoriser davantage encore leurs école, et aux pauvres de le voir, impuissantes, se transformer en Fort Alamo. Or cette heureuse initiative, comme l’explique Claude ALLEGRE, prétend répondre d’une part aux rythmes naturels de l’enfant, d’autre part aux attentes sociales. Comment diable, par exemple, des travaux scientifiques mettant en évidence une mémorisation optimale en fin d’après-midi peuvent-ils justifier n’importe quel aménagement du temps de travail ? Pire qu’une foutaise, c’est une manipulation. Quant aux attentes sociales, si l’on fait abstraction des connotations socialisantes du terme, que reste-t-il ? Des on dit, une vox populi nébuleuse, les bonnes gens… car personne, que je sache, ne les a ni exprimées, ni évaluées !
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En somme, Claude ALLEGRE est un ministre démagogue et néo-libéral qui mérite toute la sympathie et les encouragements du Figaro Magazine.






 

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